Mais si, La Tyrolienne, vous êtes mal informé (e) : on fait des trucs sur le terrain ! Et si vous voulez nous soutenir et nous aider, on est preneur ! Ce sera plus productif que de nous donner des conseils sur le web !!
Voyez cet article. Il est un peu long et je m’en excuse auprès de ceux que le sujet n'intéresse pas..
Il est prévu pour le prochain numéro du canard dont je suis l’un des responsables, un canard associatif parmi d’autres, édité par une association parmi d’autres.
Et il parle surtout des Alpes et du loup, mais le fond vaut aussi pour l’ours non ?
Je vous le livre en avant-première ! Bonne lecture.
FERUS : Le groupe "Pastoralisme" en état de marche !
Nous avons montré la voie dès le début. La conservation durable du loup en France ne se fera que si les mouvements associatifs de protection de la nature tels que le nôtre s'intéressent de près aux impacts sur l'élevage du retour des grands prédateurs.
Pour le loup, cela figure d'ailleurs noir sur blanc dans nos statuts depuis la fondation du Groupe Loup France, en 1993. La première manifestation concrète de cette orientation de principe a été le développement de l'écovolontariat, d'abord avec "
Aide-berger, Aide loup", puis avec "
Pastoraloup ".
Pour l'ours, le ton a d'abord été donné par des organisations telles que l'ADET ou le Fond d'Intervention Eco-pastoral (FIEP) qui oeuvre depuis 25 ans avec l'aide continue du WWF à l'amélioration des conditions de travail des bergers, essentiellement en Béarn, et, depuis quelques années, par l'Association pour la Cohabitation Pastorale, une organisation amie née dans les Pyrénées centrales de la volonté de quelques éleveurs, bergers, apiculteurs soucieux de développer leur activité sans réclamer pour autant l'éradication de l'ours ! Sans oublier évidemment l'implication historique d'ARTUS pour tout ce qui concerne l'utilisation, en France, des chiens de protection, puisque nous avons été les premiers à promouvoir cette technique avec Pascal Wick, entre autres.
Dans les Alpes, cette nécessité du dialogue aura fait en janvier l'objet de la seconde édition des Rencontres Eco-pastorales dont l'ACP et FNE auront été les organisateurs... Elles ont également été au centre des débats des Entretiens du loup qui ont eu lieu récemment à St Martin de Vésubie et seront encore au cœur du Colloque dédié aux jeunes chercheurs et personnels de terrain, organisé par FERUS au Muséum d'Orléans à l'occasion de notre assemblée générale, les 20, 21 et 22 mars.
Mais il faut aller plus loin. Avec la création, au sein de FERUS, d'un " groupe de travail pastoralisme" plus spécialement dédié à ces questions de "cohabitation" entre l'homme et les grands prédateurs, notre association entend passer la vitesse supérieure. Pas inutile au moment où des bruits de bottes persistants se font jour et où l'avenir de nos ours et de nos loups semble se jouer..
Ainsi, le 9 décembre, à la Motte du Caire, nous avons répondu présents à l'invitation de Daniel Guerassimenko, directeur de l’Office intercommunal de tourisme du pays de la Motte-Turriers (Hautes Terres de Provence) . Thème de cette rencontre : " L’environnement exceptionnel du massif des Monges et ses grands prédateurs peuvent-ils être une opportunité d’axe de développement durable compatible avec les intérêts de tous ?. Tout un programme, et un enjeu de taille.
Les organisateurs avaient convié à cette première réunion des représentants des élus, éleveurs, l'ONF, l'ONCFS, l'Office du tourisme, la DDAF, des accompagnateurs de montagne, la chambre d’agriculture, et les associations de défense du loup et de l’environnement. Jean-François Darmstaedter, Daniel Madeleine, Marc Linarès et Patrice Reynaud y ont représenté FERUS. Nous y avons posé le problème en ces termes : " Pourquoi le loup ne serait-il pas une opportunité de développement consensuel plutôt qu’une source de déchirement ? " et avons principalement présenté Pastoraloup, ainsi que l'expérience des Abruzzes (un compte-rendu détaillé rédigé par Patrice peut vous être adressé sur demande).
Une réflexion interne à FERUS est en cours sur l'ensemble de ces questions. Au-delà de Pastoraloup, le groupe pastoralisme de FERUS souhaite renforcer le lien avec le monde de l'élevage et lancer d'autres actions communes "éleveurs-Ferus". Il s'agit de travailler ensemble dans une nouvelle voie, loin de l'éternel clivage pro et anti-loup, afin que bergers et "écolos" s'associent pour développer et promouvoir des modes de cohabitation durables et équitables et valoriser la profession et les territoires ruraux. Pour l'heure, le projet principal est l'élaboration d'une déclaration commune qui exposerait nos positions, nos volontés et nos projets. Ceci étant clairement défini, il faudra ensuite faire connaître notre démarche fédérer de nouveaux éleveurs et exercer un lobbying au près des différents acteurs du dossier loup : administrations, OPA, syndicats, associations, élus … pour faire avancer certains sujets qui posent toujours problème. Sur le terrain, nous disposerons des écovolontaires pour concrétiser nos projets.
Différents thèmes de réflexion sont à travailler et la participation de l'ensemble des adhérents de FERUS peut y contribuer. De nombreuses préoccupations reviennent systématiquement dans nos discussions avec les éleveurs : questions administratives, spécificité des petites exploitations et des troupeaux sédentaires, vulnérabilité sur les parcours en zones intermédiaires ou sur les quartiers d'hiver, manque de cabanes d'alpage, problèmes de la maîtrise du foncier, valorisation des produits... L'utilisation des chiens de protection devra aussi faire l'objet de notre attention : il y a beaucoup d'interrogations à leur sujet chez les éleveurs, l'éducation, la mise en place, le suivi etc.. Les besoins en équipements des exploitations sont grands, les diagnostics pastoraux révèlent que face aux risques de prédation il faut repenser les méthodes de gardiennage et adapter les pâturages : débroussaillage, nouvelles cabanes, nouveaux point d'eau, parcs en dur amovibles … Grâce à l'écovolontariat, FERUS a l'opportunité d'apporter une aide manuelle à la réalisation des ces aménagements pastoraux. Nous réfléchissons également à l'optimisation de notre EIR (Equipe d'Intervention Rapide) : la rendre opérationnelle toute l'année, renforcer l'équipement et les compétence des équipes … Comment intégrer à l'avenir ce type de problématiques dans notre action associative ? La tache est d'autant plus complexe qu'en matière de protection des troupeaux, il n'y a pas de généralités transposables systématiquement, tout est affaire d'adaptation, de dosage. En fonction des spécificités locales et sans jamais négliger le facteur humain.
Enfin, sur le fond, un débat qui nous interpelle tous : les éleveurs ne peuvent pas être "pour" le loup, mais beaucoup ne demandent pas pour autant son éradication. Nous souhaitons la conservation du loup mais pas au détriment du pastoralisme. Cohabitation, supportabilité, autodéfense, plan de gestion, protocole de tir… il va nous falloir préciser tout cela ensemble ! (Article rédigé par la Gazette à partir des documents de Jean-Luc Borelli pour Pastoraloup et de Patrice Reynaud pour la rencontre des Monges.
Pastoraloup, ça marche : témoignage d'un éleveur
Cravirola est une ferme isolée à 1200m d’altitude sur la commune de La Brigue à la périphérie du Parc National du Mercantour, à quelque centaines de mètres de la frontière italienne. La ferme est gérée par un, groupe de six personnes sous forme coopérative. Elle organise aussi des activités socio-culturelles, artistiques, des chantiers de jeunes pour la reconstruction du lieu. Notre principale activité et quasi unique ressource économique est l'élevage laitier. Nous transformons la lait et vendons sur les marché des produits issus d'un cheptel de 7 vaches, 15 brebis et 45 chèvres. Le pâturage est la principale source d'alimentation du troupeau pendant 8 mois de l'année, complété par un important apport en foin de Crau surtout en hiver.
L’élevage a été mis en, place depuis 1985 avec un système de pâturage libre, non gardé, sur une surface non limitée de 300 à 400 ha environ. Ce système nécessite peu d'intervention humaine sauf par moments, surtout à l'automne, 1 pour la reconduite des chèvres à la bergerie lors de la traite du soir. Notre intérêt étant une production laitière stable sur toute l'année nous travaillons avec des mises bas décalées et une alimentation complémentaire en matières protéiques à faible dose mais tout au long de l'année, favorisant ainsi des lactations prolongées. Le fourrage d'excellente qualité assure le maintien d'un bon niveau de lactation pendant l'automne et l'hiver, l'herbe fraîche du printemps provoquant une augmentation de la quantité dé lait. Le principal problème est la période estivale avec ses fortes chaleurs, le troupeau restant sur des parcours entre 1200 et 1 50Q mètres d'altitude . Pour arriver à un temps, de pâturage effectif ,d'au moins 7 à 8 heures par jour correspondant au besoin des animaux pour une lactation suffisante, nous avions pris l'habitude de les laisser manger la nuit entre mi juin et mi septembre.
Ce système est devenu impossible avec l'arrivée du loup dans notre secteur. En juillet 1993 nous avons subi une première attaque de nuit et depuis nous avons supprimé le pâturage après la traite du soir ( sauf pour nos vaches adultes, qui n'ont jamais été victimes du loup). La conséquence fut une chute catastrophique du lait dès l'apparition des premières grosses chaleurs et un important manque à gagner chaque année au moment de l'arrivée des touristes sur les marchés.
A partir de 1995 nous avons eu aussi des attaques en plein jour, en moyenne 2 à 4 animaux tués tous les deux ans, nous obligeant chaque fois à accompagner le troupeau pendant plusieurs semaines, le temps d'être plus ou moins surs que les loups aient quitté notre secteur. En juin 2002 nous avons pour la première fois vu le loup de nos propres yeux : deux jeunes loups, qui se sont éloignés seulement en entendant nos cris et ceci à moins de 100 m de notre maison.
Durant l'été notre charge de travail est intense et l'obligation à ce moment pour une personne de rester toute la journée avec le troupeau aurait posé des difficultés supplémentaires. Nous avions entendu parler des, «éco-volontaires», mis à la disposition des bergers par le « Groupe Loup France » et cela nous semblait une solution intéressante à notre problème. Après un contact pris avec la personne responsable, une jeune femme est arrivée chez nous trois jours plus tard pour accompagner nos chèvres pendant 3 semaines, d'autres éco-volontaires se sont succédés pendant tout l'été.
Nous avons renouvelé cette expérience en 2003, mais avec un système de garde amélioré. Cela nous à permis de limiter la chute de lait en période estivale dû à la suppression du pâturage de nuit. Cette fois ci les éco-volontaires ont accompagné le troupeau le matin jusqu'au lieu de chôme. Après, ils sont rentrés à la maison où ils ont pu se reposer ou participer aux autres activités de la ferme. En fin d'après-midi, ils partaient récupérer les chèvres pour les amener à la bergerie juste au moment de la traite. ils accompagnait le troupeau ensuite pour un pâturage d'après-traite jusqu'à la tombée de la nuit.
De cette façon le temps effectif où les animaux ont pu manger à été rallongé d'environ deux heures la traite a pu se faire à l'heure exacte chaque jour . Aussi les éco-volontaires ont pu échanger d'avantage avec lès autres personnes présentes sur la ferme.
En somme une démarche très intéressante pour les deux parties, un véritable soulagement pour les éleveurs qui doivent faire face à une difficulté de plus avec la présence du loup, mais aussi une expérience utile pour les jeunes éco-volontaires, citadins pour la plupart, qui nous expliquent leur motivation pour la défense du loup et qui apprennent de cette façon concrète la réalité du terrain. (Témoignage de Axel de Haas, éleveur laitier à là Ferme Cravirola, La Brigue, Alpes-Maritimes).
En 2004: découvrez et participez à Pastoraloup !
La saison 2003 s'est clôturée par un week-end bilan dans la région de Sisteron au mois de novembre. Eleveurs, écovolontaires, membres de FERUS se sont réunis pour deux jours de témoignages et d'échanges. Les écovolontaires nous ont fait ressentir à quel point " l'estive " est une expérience forte à vivre et qui leur a permis d'appréhender plus justement la problématique loup- pastoralisme.
Pastoraloup 2004 est lancé, nous espérons une implication encore plus forte des membres des réseaux locaux de FERUS, notamment dans l'Equipe d'Intervention Rapide, qui pour fonctionner efficacement à besoin de "gens de terrain" proches des zones d'action. Bien sur nous aurons également besoin d’autres volontaires pour partir en "estive" tout au long de l'année.
Pour vous présenter Pastoraloup et vous faire découvrir le pastoralisme, nous organisons en 2004 une série de rencontres sur le terrain. (inscription une semaine avant la sortie au plus tard). Nos éleveurs partenaires seront heureux de vous accueillir et de vous parler de leur profession, vous pourrez ainsi visiter leur exploitation, assister à " l'agnelage " ou encore participer aux transhumances. Les premières rencontres sont les suivantes :
· 3 avril : Randonnée sur les traces du loup en Belledonne en compagnie d'un naturaliste local
· 4 avril : Découverte d'une nouvelle zone à loup en Diois
· 10 avril : visite au berger et randonnée sur ses pâturages dans le PNR du Verdon
· 11 avril : visite au berger et randonnée sur ses pâturages dans le massif des Monges
· 1er mai : Visite d'une exploitation (Isère) avec un technicien pastoral en charge de la mise en place des moyens de protection
Pour recevoir le programme complet de 2004, adressez vous à Jean-Luc Borelli au 06 84 75 05 13, envoyez lui un message électronique Ã
lulu.bo@club-internet.fr ou écrivez à FERUS. Si dans votre région vous connaissez ou rencontrez des éleveurs ou des personnes intéressées par l'écovolontariat n'hésitez pas à leur parler de nos actions: aide à la surveillance, interventions d'urgence, chantiers d'aménagements pastoraux. Vous pouvez aussi nous demander la nouvelle brochure d'information Pastoraloup et la diffuser localement.