medinenko a écrit:
Eh bien, merci pour ces enrichissants témoignages, on se sent beaucoup, beaucoup moins seul
Comme quoi, une connerie peut changer radicalement une pratique
Un peu aussi faire une grosse connerie,
Samedi 20/06/2020, c'est mon anniversaire, je pars en vallée d’Ossau pour aller gravir la Petite Arcizette, l’Arcizette Centrale et la Grande Arcizette (que j'ai déjà gravie).
Je démarre de bonne heure à la frontale du Pont de Goua, la météo est bonne et la forme est là . J'attaque la Petite Arcizette par le versant sud, c'est raide mais ça passe relativement bien et à 8h, je suis déjà en haut.
Direction l’Arcizette Centrale, je suis obligé de quitter assez vite l’arête pour descendre par le versant sud, c’est très exposé mais je suis concentré, j’arrive au col, j’attaque l’arête pour l’Arcizette Centrale, plus je me rapproche du but, plus c’est aérien et dangereux, il plane une (prémonitoire ?) odeur de poudre, j’arrive enfin au sommet à 10h.
La poursuite de l’arrête n’est pas envisageable, je fais donc demi-tour avec comme objectif la Grande Arcizette, je dois repasser avec beaucoup de concentration tous les passages dangereux.
Un peu plus loin, j’hésite entre, basculer versant nord par un couloir herbeux très raide et humide (afin de rejoindre l’itinéraire que j’ai déjà fait) ou descendre par le versant sud.
J’opte pour le soleil du versant sud, je descends un peu mais je ne veux pas trop perdre de dénivelée, alors je prends assez vite à gauche une vire faussement accueillante.
J’aperçois en contre-bas le plateau suspendu (côte 2017m) que je veux rejoindre mais, problème, je le surplombe d’une cinquantaine de mètres du haut d’une falaise verticale!
Je poursuis la vire qui devient extrêmement aérienne car j’aperçois au loin une cheminée.
Arrivé au-dessus de celle-ci, il reste une vingtaine de mètres ? pour rejoindre le plateau…
Je suis dans une voie sans issue car la vire est finie, je me pose un peu pour faire le point, descendre cette cheminée verticale sans corde ou revenir par la vire très dangereuse ?
Je m’engage dans la cheminée face à la paroi, pas de prises, ni pour les mains ni pour et les pieds, j’en ressort aussitôt, c’est chaud !
Je réfléchis encore une fois, je suis dans un situation de non-retour, revenir par cette vire ne m’inspire pas du tout et il y a ce plateau juste en dessous …
Je reviens dans la cheminée, pour me rassurer je me dis que j’ai déjà fait des « trucs » difficiles, de nouveau face à la paroi verticale, avec les pieds et mains sur quelques mm2, je n’ai pas le temps de me dire que c’est une folie, la lumière c’éteint d’un seul coup, je pars, dans le vide…
Dans cette fraction de seconde, je me dis que c’est fini… je me retrouve sur le plateau, la lumière c’est rallumé, je suis vivant, comment est-ce possible ?
Je me relève mais il y a quand même des dégâts, ma langue m’indique qu’une dent c’est envolé avec une lèvre explosée, tout mon côté gauche est sérieusement amoché et ma main gauche saigne abondamment.
Mon sac à dos m’a sauvé en faisant office d’airbag, je peux marcher et je rejoins un névé pour me mettre de la neige sur toutes mes blessures.
Le Pont de Goua est loin mais pas question d’appeler un hélicoptère, je dois absolument essayer de rejoindre au moins le GR10 et le plateau de Cézy.
Finalement, j’ai réussi à rejoindre ma voiture, je n’ai rien manger depuis l’aube, je suis en hypoglycémie…
Voilà , j’ai longtemps hésité à posté le détail de cette histoire, le bilan de cette journée c’est que maintenant j’ai peur, une bonne peur, celle qui m’a quand même permis de faire l’Escarra cet été…
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