Sitôt les arêtes de Cap de Long conquises, je repars 3 jours en compagnie de Cathy, une copine sur le canyon d'Ordesa.On quitte la voiture à 13h le lundi, du col des Tentes; le passage de la cascade des Sarradets est assez cocasse pour certains : ça a fondu depuis que l'on était passé par là pour le Taillon, et quelques touristes prennent un sérieux bain de pieds
Grand beau ce 1° jour.
On bascule en Espagne et on descend moitié dans la neige, moitié dans le pierrier pour arriver ensuite sur une autre planète : Plana Millaris.C'est situé entre le col del Descargador et le col de Millaris.
Ici c'est comme si le temps s'était arrêté : une immense étendue plate s'étale à nos pieds; paysage lunaire : la mer de la tranquilité est loin, mais qu'est ce que la plage est belle
Impression d'être seul au monde dans cet endroit désert; on a claqué la porte de la Brèche derrière nous et on a pénétré dans une autre dimension
Ici les tracas n'ont plus cours devant tant de beauté sauvage; que les "sapeurs" de moral aillent se rhabiller
...
Soudain, après le col de Millaris, autre décor; le minéral laisse la place a un endroit enchanteur : tapis de fleurs ( ah les botanistes, ça ferait votre bonheur, autant de variétés
)pelouses nous invitent à s'y rouler
Les marmottes nous accompagnent.
Moment d'extase. Carpe diem.A fond.
Partie de cache-cache avec les névés :
On repère pour le lendemain, des emplacements de bivouac; mais pour ce 1° soir, nuit à la belle étoile à 3/4 d'heure de marche du refuge de Goriz, juste au-dessus de l'entrée du canyon d'Ordesa.
Nos voisins : des bébés marmottes.
Le lendemain, départ à 7H30 pour le canyon, par la Faja de Pelay.
Un chemin descend dans le canyon ; c'est aussi par là qu'il faut passer pour rejoindre la Faja :
Deux isards surgissent sous notre nez.
Quelques nuages floconneux sont déjà présents, témoin d'une masse d'air instable; je garderai un oeil dessus toute la journée.
Et là en une seule journée, 13 années de montagnes sans voir d'edelweiss réparées : ce sont des centaines de ces superbes fleurs duveteuses qui sont à nos pieds.
Incroyable
L'appareil photo surchauffe
On ne sait plus où donner de la tête; d'autres fleurs aux couleurs chatoyantes nous ravissent.
Le paysage quant à lui est tout simplement époustouflant : des falaises nous surplombent, avec des formes étranges dans lesquelles on devine des têtes cachées...Passage dans la forêt : ici plus d'edelweiss, mais rencontre avec un lys Martagon
et d'autres fleurs splendides ( je laisse le soin aux botanistes de mettre des noms dessus
)
Ce canyon est un véritable régal pour les yeux; la nature nous gâte tellement !!Quel bonheur de découvrir tous ces charmes
On croisera une trentaine de personnes dans le sens inverse. 4 heures après avoir quitté le bivouac, on arrive au mirador de Calcilarruego.Des personnes arrivent d'en bas, par une montée très raide; on décide de ne pas descendre par là , mais de revenir par le même chemin emprunté à l'aller, afin de voir ce que l'on avait dans notre dos le matin.
les 3 soeurs:
On découvre le Cirque de Gavarnie sous un autre angle: du mirador, face à nous la Brèche , le Casque, etc...
Sur le chemin qui passe en bas du canyon, il y a foule; on s'arrête dans un petit coin sympa pour le repas et on retourne sur l'emplacement de bivouac.
Au passage rafraichissement sous l'eau des rares cascades .
Puis on remonte sur Goriz; on profite du moment pour se reposer et digérer tout ce que l'on vient de voir. Un hélico fait des rondes incessantes pour amener du matériel servant à l'agrandissement du refuge.Ensuite on reprend notre marche; but de la manoeuvre : retourner bivouaquer pour le 3° soir dans les pelouses repérées la veille.
On trouve notre bonheur parmi des tapis de fleurs. Cathy se trouve un abri parmi qq cailloux non loin d'une" grotte"
mais je préfère rester dans la verdure. On se lave dans le torrent repas puis on disparait dans les duvets. Dans le ciel, les nuages menacent; Deux isards curieux s'approchent de mon " campement" je ne bouge pas afin de ne pas les effrayer. Puis vers minuit, qq gouttes tombent sur mon sursac
aïe, aïe, aïe, ce à quoi je pensais est en train d'arriver
A l'ouest des éclairs illuminent le ciel; c'est sûr, vu le déplacement des nuages ça va être pour notre pomme; et au premier rang même, qu'on va profiter du spectacle; Cathy me dira plus tard qu'elle s'est réfugiée dans la grotte. J'attends encore un peu avant de bouger : la pluie s'est arrêtée. Puis l'orage gronde de plus en plus fort, la pluie s'intensifie.
Je suis saucissonnée dans mon sac à viande-duvet-sursac et j'attends stoïquement la suite des évènements
les éclairs sont en nappes ( de nuages à nuages) donc pour l'instant pas de foudre qui risque de me frapper et me faire rôtir
St Pierre s'énervant, je décide de rejoindre la grotte ( 150 m de mon emplacement) mais malgré la lueur des éclairs et de ma frontale, je ne la trouve pas ( j'ai remis le sac sur le dos, me suis rhabillée et ai roulé tout le couchage dans le tapis de sol : ça doit valoir la photo, d'ailleurs d'en haut, j'arrête pas d'être flashée
)J'appelle Cathy, pas de réponse.
Voulant éviter de me trouver au fond d'un trou:
je me pose de nouveau sur un morceau de pelouse;ce sont alors des seaux d'eau qui tombent.le sursac semble étanche mais pourtant ,à un moment donné je trouve curieux cette sensation de flottement au niveau de ma tête : je rallume la frontale et jette un oeil dehors : arghhhhh, mon tapis de sol flotte
, mes bâtons, mon sac et mon piolet font de la brasse coulée : je suis dans une flaque
l'eau canalisée par les rochers n'a pas trouvé mieux que de stagner pile poil où j'ai élu domicile
Ne sachant pas marcher sur l'eau ( ça doit juste tenir à une question de prénom
) et n'ayant pas perçu de branchies, je me pousse un peu : dans un très gracieux mouvement de reptation ( rappelez vous le saucisson sac à viande-duvet-sursac
) je me déplace à la façon limace ( mais grosse la limace
)de qq mètres.
Et je referme les écoutilles. Qq minutes plus tard, manquant d'air, j'ouvre le sursac et aperçoit une lueur : c'est Cathy qui est en train de quitter son abri de fortune et d'aller dans la grotte. je l'appelle et lui dit de maintenir l'éclairage face à moi, afin que je puisse la rejoindre.J'abandonne mon arche de Noé ( qd je vous dit que ça ne tient qu'à une histoire de prénom
) et vais dans la grotte. Evidemment une fois installée dans ladite grotte plus de pluie
l'orage s'éloigne, après 2 heures de spectacle son et lumière
J'ai donc pu m'assurer que mon sac rando est étanche ( déjà testé au retour de l'Escuzana sous les grêlons)et que mon tapis de sol lui, a un coefficient de flottabilité plus qu'acceptable
On finit donc la nuit au sec en rigolant de notre aventure.J'avais déjà essuyé des orages sous tente, mais jamais sous sursac :
Une expérience à vivre; si, si
Et le lendemain arrive : rencontre avec un furet près de la grotte; on déjeune, on remballe et on se rentre, direction la Brèche. Le ciel est couvert et plus l'on monte, plus le plafond baisse; merci à l'inventeur des cairns
qui permettent plus que jamais de s'orienter dans le brouillard; à la faveur d'une éclaircie on voit la Brèche; plusieurs groupes en descendent.Puis, le soleil fait de brèves apparition; on bascule versant français et on mange au refuge sur la terrasse.Ensuite descente à la voiture.
Et voilà , fin d'une magnifique épopée ; on s'est vraiment régalée; on ressort de ces 3 jours, complètement transformée, et on se dit que toutes les misères de ce bas monde ne sont finalement que futilité, tant la nature nous donne de bonheur.A nous d'en tirer la " substantifique moelle" comme dirait Rabelais je crois.
Et voici les photos :
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