J'avance, les yeux rivés vers ce "monstre" de glace gigantesque, dont la face est tourmentée d'immenses séracs et de gouffres béant qui lui donne parfois cet allure si effrayante. Moi il me fascine. Mon regard est rivé vers ce dôme étincelant éclairé par un ciel bleu nuit dénué de nuages.
Nous sommes enfin au pied. Nous faisons une pause, histoire de se ravitailler, et de faire un dernier point avec Christelle et Serge avant d'attaquer la longue montée qui nous attend.
Alors que dans la nuit, certains touchent déjà au firmament, nous abordons les premiers contreforts. La pente est raide d'entrée, mais le cheminement se fait sans trop de difficultés grâce à de nombreuses conversions dans une trace déjà bien marquée.
Nous nous jetons dans la gueule du "monstre". L'effort est constant, les replats peu nombreux. Nous nous élevons très rapidement et déjà mesurons l'immensité du glacier que nous avions commencé à remonter la veille.
La trace s'éloigne vers l'est pour décrire une large courbe et finalement revenir pour contourner une première barre de séracs. Sous nos pieds, 5 à 20 cm de neige fraîche.
Je me retourne pour voir si tout est "OK". Christelle se démène avec la corde, tandis que Serge est toujours concentré. Nous sommes tous émerveillés par le monde qui nous entoure. La lumière du jour finit par frapper la nef de l'édifice. La magie glaciaire opère. C'est un enchevêtrement de concrétions, de sculptures de glace et de neige qui nous entoure. Le spectacle est grandiose, irréel, digne d'une autre dimension, mais tellement féerique.
Nous atteignons la barre supérieure de séracs dont le franchissement est farouchement défendu par une profonde et large crevasse, heureusement comblée aujourd'hui par un épais pont de neige. Mieux vaut ne pas s'attarder dessus. La pente se redresse et la trace emprunte un dévers de neige dure dans laquelle le piolet rentre à peine, passage clé plus impressionnant que difficile, qui n'opposera que peu de résistance à mes deux compagnons de cordée.
Cela fait maintenant plusieurs heures que nous avons quitté le refuge. Le soleil monte sur l'horizon. La journée va être belle. Nous croisons les cordées qui ont déjà atteint le sommet, alors que d'autres petits casques partent à l'assaut de la flêche qui nous surplombe.
Nous cheminons maintenant sur la partie supérieure, la pente est moins raide. Nous sommes à la brèche et il ne reste plus qu'à franchir la rimaye, et à gravir cette ultime pente de neige.
Après un moment d'attente afin de laisser redescendre une cordée italienne, nous nous engageons enfin. La rimaye franchie, je me dirige sur la route pavée de blanc qui semble s'élever droit vers le ciel. Je suis en train de vivre un rêve de gamin. Tant de fois j'ai regardé ce Moby Dick de glace sur des photos, tant de fois j'ai imaginé cet instant. Le sommet est désert, le géant de glace nous appartient. Je fais les derniers pas, Christelle et Serge me rejoignent sur la calotte de neige. Nous avons tous les trois des regards d'enfants découvrant leur cadeau au pied du sapin au matin de Noël. Nous tombons dans les bras les uns des autres.
A l'aube du 7ème jour, 8h45, l' altimètre affiche 4015 mètres d'altitude. Le jour s'est à peine levé et nous marchons sur le Dôme des Ecrins...
Merci et un immense bravo


Le glacier Noir et le col des avalanches
Le front du glacier blanc
Vue vers le Pelvoux et l' Ailefroide
Le "Monstre de glace"
Dans la gueule du "Monstre"
Glacier blanc, col des Ecrins, Roche Faurio
Glacier blanc
Sur le Dôme des Ecrins






Petite pause à la brèche Lory avant la descente
Et pendant ce temps là....
@bientôt, en direct des cimes...