Les images qui vont suivre, aussi belles soient-elles, ne reflètent qu'une infime partie de la grandiloquence des décors que nos belles montagnes nous ont offerte en cette toute fin de juillet 2013.
Début de la randonnée assez tard dans la journée de lundi. Le temps est beau mais ça se couvre.

Après une heure de marche, Michel, qui m'accompagne pour toute la randonnée, s'aperçoit qu'il a oublié ses crampons dans la voiture... Il se fait tard, plus question de faire demi tour pour aller les chercher.


On installe le bivouac entre deux bras du torrent. Le ciel est bas. Perdu sur notre ilot entouré d'eau, on regarde les brumes qui tantôt accrochent les cimes.

Tantôt les relâchent...

Le lendemain, le temps est au beau fixe. Première vues sur le Balaïtous.

Après une montée harassante, on grimpe à ladite : "Brèche des Ciseaux".

C'était sans compter qu'il y avait TROIS cols sur cette même crête qui comportaient chacun un gendarme en forme de ciseaux en son centre... Michel met 1h15 pour monter les 80m d'éboulis et de neige jusqu'à la crête frontalière. Je l'encourage à poursuivre, descend pour lui apporter mes crampons et porter son sac jusqu'en haut.

Nous arrivons enfin en haut, mais, épuisé par la montée, Michel jette l'éponge. "Je redescend." Déçu et un peu honteux, j'entame la descente. Je pense alors à installer un bivouac près du Lac de Batcrabère, quand je comprends mon erreur. Le passage pour franchir la frontière se trouve plus à gauche. Je convainc mon coéquipier de franchir le bon col que j'ai repéré désormais. Nous trouvons le départ de la Grande Diagonale, traversons des névés avec un crampon chacun et à la Cueva Michaud, nous hésitons. Nous croisons les deux dernières personnes qui redescendent du sommet. Après un long moment de réflexion, nous décidons de tenter la partie finale de l'ascension ce soir, en sacs lourds. On veut bivouaquer au sommet. C'est un pari très audacieux. On ne connait pas vraiment la difficulté de l'ascension, et on réalise encore moins ce qu'elle représente avec des sacs entre 13 et 15kg.
La montée est rude, parfois aérienne, mais pas assez pour nous faire renoncer. A mi-chemin, nous nous arrêtons faire fondre de la neige du névé central avec le réchaud à gaz. Nous ne sommes pas sûrs de trouver de la neige au sommet, et il nous faut impérativement de quoi boire et cuisiner ce soir. Nous passons quarante cinq minutes dans une positions très inconfortable à rendre la neige liquide. L'heure tourne.
A cet instant, je comprends que l'hypothèse d'un demi tour s'épuise. Le soleil décline à grand pas, et Michel, sans frontale, ne pourra pas redescendre la Grande Diagonale. C'est tout ou rien.

D'énormes panaches de nuages remontent le long de la Face Nord, donnant une dimension très aérienne à l'ascension. Toujours personne en vue. Nous sommes seuls sur un sommet désertés de tous. Nous entamons l'escalade finale. Cheminées et vires étroites nous font perdre quelques litres de sueur et les sacs que nous portons semblent déterminés à nous faire basculer dans l'abîme.

Enfin, la pente s'adoucit. J'aperçois la pointe du grand trépied sommital. Je jubile. Je n'y croyais vraiment plus... On l'a fait ! On va avoir notre bivouac au sommet !

On s'empresse de monter la tente, et de faire chauffer le repas. Une brise légère fait claquer la toile orange. Le soleil disparait progressivement derrière les cimes occidentales. Le décor est à couper le souffle.






Le lendemain, Michel se réveillera avec un an de plus. Quel bel anniversaire... J'espère qu'un 8 octobre prochain aussi, à mon réveil, j'aurai un décor semblable.
