Les vacances, c'est un bon moment pour sortir un peu des balades routinières, faire de belles traversées pour certains, découvrir des endroits nouveaux pour d'autres...J'ai décidé de faire les deux en même temps, en faisant une traversée en solitaire de la pradera d'ordesa à gavarnie, en passant, si les conditions y sont, au mont perdu. Pas de traversée paumatoire dans ce secteur que je ne connais pas et qui devient vite technique sur un terrain que je hais : des dalles calcaires partout. Je ne prends donc que de l'ultra-classique, avec que du facile en obligatoire : départ de la pradera d'ordesa, faja de pelay, goriz par le GR11, dodo, et le lendemain goriz-mont perdu-goriz-col des tentes. Deux journées très équilibrées, comme vous pouvez le voir

Je laisse donc ma voiture à Torla, je prends le bus et me retrouve à 12h30 au fond du canyon d'ordesa, à la pradera, au milieu de la foule. La montée à Goriz par la faja de pelay n'est à envisager que par beau temps, et ca tombe bien, il n'y a pas un nuage :

Euh, bon, on va mettre le turbo, au cas où : moi et la prévision à court terme de l'évolution de la météo, c'est vraiment pas ca !
A 12h32, je suis tout seul pour les 600m de déniv qui servent de sélection, et sur la faja de manière générale je ne croiserai/doublerai qu'une vingtaine de personnes en tout. La faja par temps sec est merveilleuse, jamais je n'ai eu la sensation d'être obligé de m'approcher du vide pour continuer le parcours, et les points de vue sur ordesa et l'envers du cirque de gavarnie sont magnifiques. J'ai bien essayé de repérer et identifier les fajas qui sont dans la paroi, mais je n'y suis pas parvenu !






Enfin, je vois le bout du canyon, et à la vue de ma montre, je me dis que j'y serai vite !

Quand je marche tout seul, je compte mes pas : ca m'occupe, ca me permet aussi de savoir où j'en suis à peu près, savoir quand je dois manger/boire pour assurer une alimentation régulière, et à me livrer à de petits jeux pour deviner le nombre de pas nécessaires pour arriver à tel ou tel point. Sur le coup, heureusement que je n'ai pas parié de l'argent avec moi-même sur l'estimation pour arriver à la jonction avec le GR11, j'aurais dû emprunter pour me rembourser ! Je pensais avoir besoin de 2000 pas, il m'en faudra 4000, et en plus vu le terrain c'était des grands pas !
Mais bon, le fond visuel est tellement beau, avec les tres sorores en haut...



Enfin la jonction avec le GR11, et c'est parti pour la montée finale à Goriz sous le cagnard...J'avais 3.5L d'eau sur moi au début, j'ai tout bu !



Le lendemain, départ 7h du matin du refuge, pour éviter le cortège qui partira, à vue de nez, 1h plus tard.

Je ne savais pas trop à quoi m'attendre pour le mont perdu, j'ai vite compris que c'était exactement le genre de choses que je n'aimais pas en montagne : de la roche qui glisse, à savoir du calcaire, qui s'organise en barres rocheuses à franchir par-ci par-là, ou en un rognon pentu qui sera fatal à ma tentative d'ascension : descendre en adhérence des trucs pentus où la chute peut amener beaucoup plus bas que nécessaire, c'est vraiment pas ma tasse de thé, surtout quand on rajoute le vent qui souffle en rafales vraiment violentes. J'irai donc le plus loin possible, à quelques dizaines de mètres du début du dégueuloir, jusqu'à atteindre le point où vraiment, le stress anticipé de la descente lié à la peur de glisser, qui est viscérale chez moi, gâcherait tout le plaisir que je pourrais avoir en haut. Et c'est là que la pratique de la montagne est très subjective, et qu'on ne peut pas être absolu dans son jugement d'un parcours : là où Medhi fait l'Ossau sans corde et semble presque trouver exagéré l'emploi d'une corde, moi je préfère faire demi-tour sur un parcours de rando qui doit être côté T4 ou T5 qui sera fait sans aucun soucis par quelques dizaines de personnes dans la journée sans aucun équipement. Le danger est une notion très subjective car on peut se mettre en danger tout seul via des perceptions erronées (ma spécialité), il ne faut pas l'oublier quand on conseille ceci ou cela à un inconnu (ce qui arrive souvent sur ce forum, on ne se connait pas tous).
M'enfin, malgré tout, c'est magnifique.





Le col du cylindre parait inattaquable, et pourtant...

Le fameux rognon en bas à droite, avec chute interdite à sa gauche : quand j'ai vu des personnes qui me devancaient passer à flanc côté névé, j'ai commencé à ne plus être en confiance du tout.

Et quand je dis que la perception fait qu'on se met en danger tout seul, je l'ai bien vu là, où, pour ne pas avoir à etre en adhérence, j'ai préféré m'accrocher au flanc, mais ce n'était vraiment pas du tout un choix judicieux, la roche étant très lisse, surtout avec les rafales qui s'engouffraient entre le rocher et moi si je ne me plaquais pas immédiatement.

(j'ai pris la photo une fois que je m'étais rassuré sur le fait que je pourrais sortir correctement).
Une fois remonté sur la bosse, j'ai continué à monter, en regardant bien si je pourrais descendre sereinement. Comme ca n'était pas le cas, j'ai préféré faire demi-tour, même si j'avais fait le plus dur : le sommet était à 20 minutes meme pas. Tant pis : je pourrai y retourner dans de meilleures conditions, l'esprit plus tranquille, et donc vraiment en profiter ! De plus, il fallait qu'il me reste de l'énergie pour les barres rocheuses à descendre (la première en venant de Goriz surtout), et le reste de la journée !

Retour à 12h15 à Goriz, un déjeuner, et départ à 12h45 direction le col des tentes. Le voyage fut expéditif, sur un terrain beaucoup plus confortable pour moi.

Des mini lapiaz :

Des lignes, des formes qui ne sont pas que des blocs empilés :



Et la fameuse brèche de Roland, atteinte à 15h25



L'accès à la brèche côté francais est sec à l'exception d'un petit névé en bas du ressaut le plus haut, que l'on traverse à l'horizontale, et qu'on peut descendre sur les fesses sur 5m pour ceux qui veulent.
Passage au refuge des sarradets en travaux, un peu d'eau prise du tuyau, et passage du col des sarradets pour découvrir la vue magnifique sur le glacier et le massif du vignemale :


Plus qu'à descendre rejoindre la voiture qui m'attend sagement au col des tentes........
Une très belle traversée entièrement rando de ce massif ! Bon bien sûr les puristes pourraient objecter qu'entre la redescente à goriz par le mont perdu et le retour goriz-col des tentes il y a eu une descente interminable goriz-pradera ponctuée d'un "meeeerde j'ai laissé l'apn à goriz.....



Ces photos et quelques autres ici : https://flic.kr/s/aHsm6AgbTe
