Jour 4:
Levée de rideau (de tente), il fait beau ! Quand on est gâté, on est gâté !
Je descends tout le camping (en général, les randonneurs au long cours sont remisés tout au fond du camping, loin de l'agitation, et collectivement, j'avoue que c'est une très bonne idée )
Hier soir, cela m'a permis de faire la connaissance de 2 traverseurs et de discuter un peu.
Donc à 7h, sur la pointe des pieds pour ne pas réveiller les campeurs, je rejoins la route et traverse le village d'Arles/Tech.
La montée s'effectue sur un chemin très particulier. Je suis une bille en géologie donc je ne vais pas m'aventurer à inventer des noms de roches. Ces dernières, incurvées, laissant passer entre elles le sentier, permet de monter sans compter.
C'est très agréable et on avale assez vite les 600m de d+ en se retournant de temps en temps pour admirer la ville quittée ce matin.
Très belle vue sur la vallée boisée ainsi que le Roc Sant Salvador. Une impression de jungle Porto-Ricaine, ne me demandez pas pourquoi, je ne m'y suis jamais rendu.
Je guette le sommet de cet éperon en espérant découvrir King Kong accroupi se tapant le torse.
Encore une fois, la marche est un carburant inspiratif, ça ne s'invente pas...
On descend tranquillement vers le moulin de la Palette (qui est devenue propriété privée, la pancarte qu'ont installée les nouveaux proprio nous invitant gentiment à déguerpir).
Ici, un choix s'impose.
- Suivre le topo bêtement et rejoindre Montalba en contournant le Sant Salvador par le nord et le GR10.
- Prendre un chemin de traverse pour rejoindre le col Cerda par le sud. Cette option fait gagner beaucoup de temps et a l'air plus sauvage..
Mais... pas de carte, pas trop envie de me perdre et de faire des demi-tours, alors option 1...
(je vais me faire massacrer)
Donc je rejoins le village de Montalba par le GR10, assez joli à vrai dire.
Je croise un traverseur qui en est à ses débuts. Il souffre, beaucoup de matériel lourds qu'il regrette un peu, notamment un leatherman obèse et une flasque whisky. (Je lui ai donné mon point de vue en disant qu'il y en avait un des deux qui était inutile, facile...)
J'amorce la montée au col Cerda (très peu de souvenirs à vrai dire, donc 500 de d+ vite oubliés) dans laquelle je fais le plein d'eau. Je me souviens seulement que j'évoluais sous les arbres ce qui était bénéfique sous cette forte chaleur !
Arrivée au Col Cerda, je jette un coup d'oeil à ma droite sur le chemin par lequel j'aurais dû arriver, une pancarte annonce une propriété privée, du coup je ne sais pas ce que cela aurait donné.
La montée 400d+ jusqu'au Roc de Frausa est très belle mais aussi très dure. Le final dans la forêt fait preuve d'une inclinaison assez exceptionnelle. Peut-être que les 1500 de d+ de la matinée influencent mon impression.
Il est aux alentours de midi, arrivée au Roc de Frausa, joli panorama de tout côtés ! J'en profite pour observer la suite du chemin, et les belles Albères qui me séparent de la Mer.
Descente rapide pour rejoindre le Pou de la Neu. Bel endroit pour un bivouac !
Puis on dégringole côté Espagnol en descendant en sous-bois et en passant devant le sanctuaire des Salines. S'en suit une longue piste (chemin de l'exil) de quelques kilomètres pour rejoindre le col de Lli.
Après avoir passé les fourrés, on descend plein gaz sur Las Illas, il est 15h30.
J'avais souvent lu et entendu parler de cette zone de bivouac à Las Illas, avec sa fontaine, ses tables de pique-nique, ses toilettes et douches, son herbe et son ombre. C'est vrai que c'est très agréable...
Je me pose, me débarbouille, fais le plein d'eau et repars. Je ne vais pas gâcher cette belle aprem à faire la sieste et surtout,... pas de cervoise dans le coin !
Je vise donc le Perthus pour me désalthérer dans un bar et pouvoir m'en prendre une ou deux à emporter pour l'apéro du bivouac.
Un gentil monsieur m'explique que le GR a été détourné. Il ne faut pas hésiter à prendre l'ancien, les marques sont effacées mais certaines sont encore visibles. Go!
La réputation de cette étape n'est pas volée. La montée dans les virages des villas est un calvaire. A partir du col c'est de la piste pendant une dizaine de kilomètres. De la piste sans aucune protection arboricole. La chaleur est écrasante, le soleil perçant. Je reste en pantalon et manches longues pour ne pas me cramer la peau. Le plus important, c'est que j'ai de l'eau, rien ne peut m'arriver
La seule distraction pendant plus de 3h est la lecture du famaux panneau du Mas Nou qui nous indique que nous rentrons dans une zone « naturiste ».
Même si ça semble trivial, l'idée de croiser un petit homme en train de jardiner le sifflet à l'air nous trotte dans l'esprit et fait passer le temps.
Et au moment où on s'y attend le moins, OH ! les photos sont interdites mais je dégaine quand même mon téléphone pour photographier ce petit zigouigoui !
L'arrivée au Perthus est contrastée. Evidemment, il y a cette fiente lâchée dans la vallée par le capitalisme inter frontalier mais des jolies ruines ainsi qu'un fort remarquable viennent atténuer légèrement. Vraiment très légèrement car les ponts faisant léviter les 38 tonnes et leur vacarme sont quand même là pour tout gâcher.
On débouche par la forêt sur un parking géant, totalement vide, à quoi sert-il ?
Une cabine de toilette est posée à son extrémité. J'en profite pour faire le plein d'eau.
La question du bivouac commence à se poser. Les 18h sont largement passées. Vraiment pas envie de poser le camp ici, surtout pour le dernier soir. Je sais que là-haut, le col de l'Ouillat est très charmant, que le refuge de l'Albère propose des récompenses houblonées... Mais bon, sera-t-il ouvert à l'heure tardive où j'arriverai ?
Je veux quand même tester le coup. Je traverse le village et passe sous le pont autoroutier. Même si c'est franchement dégueu, il en impose grave et on se sent tout petit dessous...
On fait face juste après au panneau qui indique le temps de montée jusqu'au col. A vrai dire, je ne me rappelle plus exactement, mais quelque chose comme 3h et quelques... Il est 18h40...
Je dois déjà être à quelques 2000m depuis le matin, je ne vais pas vous mentir en disant que les 600m de d+ qui me faisaient face ne me donnaient réellement envie !
Mais bon, la fougue des fins de trek, les hormones sur-secrétées de fin de journée me poussent à démarrer. On se lance !
Je passe près des ruines de la Comtessa. Ca aurait été chouette de se poser là. Mais pour se ravitailler en eau pour le bivouac, pas évident. Je garde mon idée en tête.
La montée alterne entre piste, route, forêt, chemin à découvert.
J'arrive enfin dans une forêt, le soir tombe, je n'y vois quasiment plus rien et je sens que je suis proche du but. L'ambiance est parfaite. La pénombre du soir n'est pas la même que celle du matin, pour de multiples raisons. Je profite gaiement, dans un état second, de ces derniers hectomètres.
J'arrive enfin au refuge et aperçois quelques lumières, il est 21h, c'est bon signe !
Je salue le gardien et les employés, qui me répondent que malheureusement ils sont fermés.
…
« Même pour une petite bière ? »
Sourire des deux côtés « mais oui, pas de soucis, on ferme dans quelques minutes »
Inutile de vous dire que je suis aux anges, comblé ! Je profite d'une grande blonde en admirant les lumières qui se couchent sur le massif du Canigo. Je vole à quelques centimètres du sol...
Je remercie chaleureusement les gérants qui boivent eux-aussi un dernier coup, commande une bière à emporter pour l' « apéro », et m'en vais poser mon barda à cent mètres de là, dans un endroit idyllique.
Je profite jusqu'à l'épuisement de cette belle et dernière soirée sur cette traversée, ivre de joie, et pénètre sous ma toile pour dormir comme un gros bébé.
Demain c'est la dernière (très courte) journée, je peux me permettre une petite grasse mat'
Bonne nuit
