Ce jour là, que certaines espèrent, sans forcément l'avouer, l’ours, dont le nombre aura cru par les plans de réintroductions successifs, sera libre de jouir de sa liberté retrouvée et pourra se reproduire aisément.
Mais ce jour là, il faudra peut-être songer à réintroduire, au moins pour la carte postale, une espèce locale, rustique s’il en fût, et dont certains dans leur enfance, auront découvert la présence, et conservé un vague souvenir, l’espace de leur vacances : l’homo sapiens de montagne. Celui qui en des temps pas si lointains, passait de longs mois dans l’alpage, dormant dans des constructions au confort précaire (orris du vicdessos et autre capitelle …) pour garder les troupeaux et faire du fromage, en remplissant un rôle apprécié de tous : « jardinier du paysage ».
Et bien ... je suis persuadé que l'ours, justement, contriarement aux analmyses superficielles, peut contribuer à maintenit plus que jamais ce pastoralisme que nous souhaitons tous voir perdurer.
Pourquoi ?
Où il y a des ours, il faut des bergers pour garder des troupeaux, donc des hommes en estive. Et tu t'aperçois que les éleveurs qui deviennent hystériques en ce moment, le deviennent pour la simple raison qu'ils ne veulent PLUS d'hommes en estive.
Dans les secteurs où on élève pour le lait et le fromage (Pyrénées atlantiques en particulier), ça se traduit chez les éleveurs anti-ours par de plus en plus de brebis dont l'agnellage a été accéléré pour qu'agneaux et lait soient produits AVANT l'estive, soit en plaine, soit en vallée. résultat, ils envoient en estive des brebis taries (sans lait) qui ne sont pas traites matin et soir. Résultat ? Ils envoient en estive des troupeaux plus facile à attaquer (car bien plus importants) et des troupeaux non gardés ou beaucoup moins (je l'ai vu maintes fois de mes propres yeux...).
Et leur fromage ? De plus en plus produit avant l'éte, en vallée voire en plaine, il est condamné à entrer en concurrence avec celui des producteurs de la plaine et peu à peu, il devient le même ... La montagne perd son identité et peu à peu, sa raison d'être face à une concurrence qui la fera toujours perdre.
Autre élément dans ce système qui vide la montagne de ses "hommes de l'estive" : la construction de pistes pastorales car désormais, on monte à la cabane et on en descend la même journée : on n'y passe pas forcément les nuit. Donc, on massacre le paysage en le lacérant de pistes. Et l'ours en patit... mais pas seulement : avec lui, bien d'autres espèces, mais aussi, le paysage et la tranquilité de tous (les éleveurs ont la légitimité d'y circuler, mais on sit tous qu'une piste ouverte est si difficile à réglementer ... c'est la porte ouverte aux quads, 4X4 etc...).
Face à ce système productiviste et niant l'identite même et la spécificité de la montagne, il y a encore de nombreux producteurs de fromage en estive. Eux gardent très bien leurs troupeaux. Parfois, ça peu s'améliorer (patou mieux utilisé par exemple), mais ils traient les brebis deux fois par jour (donc les surveillent et les regroupent) et sont présents sur l'estive du début à la fin de la saison. Chez eux, l'ours prélève guère de brebis... et il est bien moins craint. Chez eux aussi, le fromage "produit en estive" pourrait être considérablement valorisé car de qualité ultra-supérieure (les brebis ont été nourries des l'herbe des estives, pas dans la vallée ni à la plaine). Là, tout reste à faire ... ou presque (il existe déjà le fromage "pédescaous" produit en zone à ours avec l'empreinte de l'ours sur sa croute ... mais il n'est pas assez soutenu par les structures qui tiennent les manettes des opposants actuels à l'ours : IPHB, chambes d'agriculture, syndicats agricoles etc...).
C'est ce sytème qui produit du fromage en estive que l'ours peut aider à maintenir en jouant le jeu, en acceptant les mesures de protection (rien que le patou bien utilisé empêche les prédations et les fait chuter de 90% ... des éleveurs disent eux-mêmes en subir moins qu'avant le retour de l'ours et la venue des patous).
Donc tu vois, ceux qui cohabitent avec l'ours, ce sont ceux qui sont nombreux en estive ... ceux qui refoulent l'ours, ce sont bien souvent ceux qui vident les montagnes de leurs hommes en promouvant un pastoralisme productiviste et technocrate, avec agnellages avancés, brebis taries en estive... A mon avis, une agriculture pas durable et en tout cas privée de ses hommes.
Enfin, tu parles de ces mêmes hommes de l'estive qui jouent ...
Absolument. Mais tu vois bien que l'ours n'est pas contradictoire avec cela, bien au contraire pour les mêmes raisons que celles exposées ci-dessus. En résumé, pour qu'un troupeau entretienne réellement le paysage (je dis bien réellement : au delà de l'asertion folklorique), il faut que le troupeau soirt bien mené sur les différents quartiers de l'estive, il faut donc des hommes en estive. Plusiers études scientifiques le soulignent. Le plan ours prévoit dailleurs gratuitement des aides-bergers en plus des patous, de l'éliportage gratuit du matériel en estive ... etc ...un rôle apprécié de tous : « jardinier du paysage ».
Voilà pour l'élévage de brebis laitières. Pas le temps ce soir de parler de l'élevage de brebis à vainde, mais dans les grandes lignes, c'est pareil : ceux qui cohabitent avec l'ours sont ceux qui restent nombreux en estive et pratiquent un pastoralisme traditionnel, mais sachant évoluer avec son temps en harmonie avec le reste de la société (très majoritairement favorable à l'ours), à la différence des anti-ours qui défendent un élevage sans hommes. Pressé, je caricature forcément un peu, mais dans les grandes lignes, mon opinion, c'est que l'essentiel est là et il faut le savoir avant de laisser entendre que l'ours ferait disparaitre l'élevage. Comment le croire avec 0,03% de prédations par an sur le cheptel pyrénéen en estive ?
Jamais l'ours n'a mis quelque exploitation que ce soit en danger... et ce n'est pas prêt de changer. Méfions nous du prêt à penser et allons voir plus loin...sur le terrain par exemple, mais avec l'esprit libre ! Méfions nous des postures toutes faites : ce ne sont pas les plus pertinentes pour analyser la situation complexe. Complexe mais compréhensible si on s'en donne les moyens.
Je parlerai de l'élevage à viande quand il sera moins tard

A bientôt,
Pap'ours